JUIN 2011
Les Opticiens sur internet
Les opticiens sur internet, pas chers mais pas toujours très nets
Délais de livraison trop longs, correction des verres approximative, qualité des montures discutable … Notre test des cyberopticiens a révélé de nombreuses anomalies. Conseils pour profiter sans risque de leurs prix cassés.
Changer de lunettes sans endurer la tournée des opticien ? C’est tout vu, la majorité des clients est pour. D’où le succès des lunetiers en ligne. Depuis dix-huit mois, les sites se multiplient : Confortvisuel.com, Direct Optic … On en compte aujourd’hui une douzaine. Et ils cassent les prix ! Les montures de marque y sont en moyenne deux fois moins chères que dans les boutiques classiques, et on peut s’offrir une paire complète à partir de 39 euros.Mais cet achat n’est tout de même pas aussi banal que de commander un livre sur Amazon. C’est le point de vue des professionnels classiques : «Essayer les montures, vérifier que l’écart entre les yeux est respecté, ajuster les branches… Comment voulez-vous, à distance, faire tout cela correctement ?», s’interroge Rita Aoun, opticienne à Paris. Et, de fait, notre test anonyme des principales enseignes à parfois révélé un inquiétant manque de sérieux et de fiabilité.
Ainsi, certains sites ne vous réclameront même pas l’ordonnance d’un ophtalmologiste (lire ordonnance ophtalmo). Elle n’est certes pas obligatoire (sinon pour se faire rembourser par la Sécu), mais la prescription d’un spécialiste permet d’éviter les bugs. Exemple : lors de notre essai chez Easy-verres.com, un site qui ne fabrique que des verres envoyés ensuite à un opticien partenaire, nous avons commis une grossière erreur en indiquant le degré de correction des verres achetés.
Acheter des verres progressifs sur le Net n’est pas recommandé
N’importe quel professionnel l’aurait détectée, mais le site ne s’est aperçu de rien et a honoré cette commande absurde…Mais le principal défaut est ailleurs. Pour que chaque verre soit parfaitement centré par rapport à l’œil, les opticiens mesurent au millimètre près l’«écart pupillaire », c'est-à-dire la distance entre la racine du nez et le centre de la pupille.
Leurs cyberconcurrents, eux n’ont d’autre choix que de vous demander d’envoyer une photo par mail. Certains recommandent de poser avec une règle graduée sur le front.
«Ainsi, notre mesure est aussi précise que dans une boutique», assure-t-on chez Simply Optic. En réalité, aucun n’a correctement estimé notre écart pupillaire, avec jusqu’à 2 millimètres d’erreur (lire le tableau ci-contre).
« suffit à générer de l’inconfort et parfois des maux de tête», s’inquiète Tarif Hurbli, ophtalmologiste à l’hôpital Cochin-Saint-Vincent-de-Paul (Paris). Un risque encore plus important avec les verres progressifs, qui exigent une précision supérieure.
Il faut aussi que le verre livré corrige la vue comme espéré. Or ce n’est pas toujours le cas. Les sites ont réussi, un sans faute pour la myopie, mais un tiers se sont trompés sur l’astigmatisme. «Le patient ne s’en rend pas compte, mais cela fatigue la vue», explique Gilles Cyrot, ophtalmologiste à la clinique Jouvenet (Paris). Gare aussi à la qualité des verres. La plupart des sites travaillent avec Essilor, un gage de sérieux, mais la taille des verres n’est pas toujours soignée. Plusieurs présentaient un polissage mal fini sur la tranche.
Enfin, sachez que si les montures de marque (Ray Ban, Gucci…) proposées par les sites sont identiques à celles que vendent les opticiens traditionnels, leurs modèles d’entrée de gamme, importés de Chine, sont le plus souvent en fragile plastique injecté. «Aujourd’hui, 3 millions de Français ayant besoin de lunettes n’ont pas les moyens de s’équiper, se défend Yves Jacquot, fondateur de Confortvisuel.com. Mais je ne conseille pas ces montures aux personnes qui souhaitent les garder plusieurs années.» Les lunettes jetables, voilà une belle trouvaille !
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